L’éventualité d’un Brexit sans accord fait planer le risque d’une interruption des liaisons aériennes entre l’UE et la Grande-Bretagne. S’il est probable qu’un tel scénario sera évité, de nombreux désagréments affecteront tout de même les passagers.

Le 29 mars prochain marquera officiellement la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. L’éventualité d’un Brexit sans accord laisse présager des conséquences particulièrement pénalisantes à tous les niveaux. Les compagnies aériennes, notamment, pourraient perdre leurs droits d’opérer des vols entre l’Union européenne et le Royaume-Uni. Un scénario catastrophe que veut absolument éviter Alexandre de Juniac, le directeur général de l’Association internationale du transport aérien (IATA), qui regroupe 290 compagnies aériennes. Ce dernier s’est exprimé à ce sujet ce mercredi dans un communiqué: «il faut se préparer à toutes les éventualités», prévient-il. Car s’il espère «toujours un accord global entre l’Union européenne et le Royaume-Uni», l’ancien patron d’Air France-KLM évoque aussi «l’extrême gravité des enjeux» et souligne «l’immense travail qui serait nécessaire pour maintenir des liaisons aériennes vitales».

 

Les compagnies aériennes réclament un nouvel accord bilatéral entre la Grande-Bretagne et l’UE, afin de pouvoir proposer un programme de vols pour les mois qui suivront le Brexit. La Grande-Bretagne pourrait aussi être exclue de l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA), ce qui contribue à générer de fortes incertitudes. «Il ne s’agit pas seulement d’autoriser les vols à décoller et à atterrir», a précisé Juniac. «Tout, des licences de pilotes aux dispositions en matière de sécurité, doit faire l’objet d’un accord». Voici donc comment les voyageurs risquent d’être affectés.

 

Interruption temporaire des vols

Entré en vigueur en 2004, le traité européen «Open Skies» autorise la libre circulation aérienne entre les pays membres. Toute compagnie aérienne ou tout opérateur européen basé dans l’un des États membres a le droit d’opérer librement dans l’UE. Théoriquement, un Brexit dur couperait totalement les liaisons, car sans accord de substitution en mars prochain, et ce jusqu’à une entente entre Londres et Bruxelles, les échanges aériens entre le Royaume-Uni et l’UE ne seraient plus autorisés. Cependant le gouvernement britannique a annoncé lundi dans une série de notes qu’il envisageait «d’accorder une permission aux compagnies aériennes européennes pour continuer à opérer», et dit attendre «que les pays de l’UE fassent de même en retour».

 

Hausse des prix

La chute de la livre de près de 15% face à l’euro depuis 2016 a mécaniquement augmenté le prix des voyages à l’étranger pour les Britanniques. Or le Royaume-Uni est le deuxième plus gros exportateur de touristes d’Europe. 76 % d’entre eux voyagent d’ailleurs vers les pays membres de l’UE. Le PDG de la compagnie low cost Monarch Airlines, Andrew Swaffield, affirmait d’ailleurs avant le référendum sur le Brexit que ce dernier entraînerait «des tarifs aériens plus élevés et moins de vols entre l’Union européenne et le Royaume-Uni».

  • Demandes de visa et d’autorisation obligatoires

La liberté de déplacement des ressortissants britanniques au sein des autres pays de l’Union européenne pourrait être remise en cause. Les Britanniques devront, en fonction des modalités négociées avec l’UE, être munis d’un visa pour quitter leur pays. Aucun accord n’a encore été signé à ce jour, ce qui imposera les mêmes règles pour les Européens en partance pour le Royaume-Uni.

  • Contrôles aux douanes rallongés

Consacrée par l’article 20 du traité sur l’Union européenne, la liberté de circulation et de séjour est également garantie par l’article 45 de la Charte européenne des droits fondamentaux. Elle constitue l’un des attributs de la citoyenneté européenne. En cas de «hard Brexit», les frontières seraient donc totalement rétablies dès mars 2019, entraînant la congestion des points frontières, le rétablissement des formalités douanières ainsi que des contrôles permanents.

  • Souscription à une assurance voyage

La carte d’assurance maladie européenne ne sera plus effective pour les citoyens britanniques. À l’avenir, ils devront souscrire une assurance voyage pour continuer à se soigner gratuitement à l’étranger.

  • Retour des duty-free

Bercy indique que selon l’avancée des négociations, «le statut de non-résident communautaire pourrait s’appliquer». Les touristes pourraient donc se voir retirer la TVA sur les produits Outre-Manche, qui est aujourd’hui de 20%.

  • Retrait des indemnisations pour les Britanniques

Actuellement, l’article (CE) 261/2004 impose des règles européennes communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas d’annulation ou de retard important d’un vol. Celles-ci s’appliquent aux passagers partant d’un aéroport situé dans un État membre. Ceux qui quittent un aéroport situé dans un pays tiers à destination d’un État membre bénéficient aussi de ces droits, mais seulement si le vol est assuré par un transporteur issu de l’union européenne. Il n’est donc pas certain que ces indemnisations aient toujours cours pour les passagers embarquant au Royaume-Uni à bord d’un avion d’une compagnie nationale.

  • Clause Brexit

Certaines compagnies, comme Ryanair, vont inclure une «clause Brexit» dans leurs ventes de billets pour l’été 2019. Celle-ci permettra leur annulation si des accords sur la question de la réglementation aérienne ne sont pas signés. Le voyagiste Thomas Cook, lui, a aussi inclus depuis octobre dernier cette clause dans ses billets d’avion pour avril 2019.

 

Par  Arthur Marcadé Le Figaro